Contes Populaires Moldaves.
Recueillis et racontes par Gr. Botezatou
Traduit du moldave par: V. Banarou, M. Ionitsa, I. Smirnov, V. Syrgui, V. Grigoryev.
Illustrations: L. Domnine.
Preface: Gr. Botezatou
Kichinev, Literatura Artistică, 1986.
Legătură: MediaFire
La Moldavie, c’est le pays des vignobles et des jardins, c’est la patrie des haïduks et des héros légendaires Grigoré Kotovski et Sergey Lazo, c’est le foyer des doïnas nostalgiques et des rondes sautillantes. Le susurrement des milliers de sources et le bruissement du vieux kodrou se font entendre sur toute son étendue. C’est ici que le Dniestr, pensif, charrie ses eaux, que blanchissant les villages inondés de lumière et que la vigne, surnommée, „touffe qui donne de la force”, amasse jour par jour le rayon du soleil, la vigueur de la Terre et le travail du Moldave en grappes d’or.
C’est non seulement à sa beauté et à la fertilité du sol, mais c’est aussi aux trésors de ses valeurs spirituelles qu’est due la bonne renommée de la Moldavie, poétisée dans le vieux et ravissant chant „Mioritsa“ comme „entrée au paradis”.
Les chansons héroïco-épiques sur Novak et Grouïa, Guéorgué-le-Brave, Kodreanou Korbea, Boujor, Toboultok et sur d’autres encore, se présentent comme des synthèses artistiques de la vie. Elles symbolisent les glorieux exploits des héros épiques, la haine ardente contre les ennemis du peuple, la nostalgie de la liberté, la lutte acharnée contre l’exploitation, l’amour de la Patrie.
Sont beaucoup aimés par le peuple les contes bleus avec des Fet-Froumos et des Ileana Kossinzana, avec Haut-Empan-Barbe-au-Vent, et Dragan-le-Brave, avec Kipa- rouche-le-Brave et Laour-Balaour, les contes avec la jeune fille la sage, avec Pepelia et le boyard avare, les historiettes avec Pakala etTindala etc.
Les conteurs du peuple sont ceux à qui l’on doit la conservation des contes, l’art du dire et la grâce de la création. Différents par le répertoire, par le caractère des créations et la manière d’interpréter, les conteurs du peuple sont largement connus dans les villages, jouissent d’une grande estime et on les écoute avec affection.
Dans les vieilles créations épiques c’est aux êtres surnaturels, fantastiques que revient le rôle de messager du charme de ce qui est conté. C’est, par exemple, le personnage poétique, un vieux à barbe blanche qui remet une coupe de miel, une flûte et qui fait savoir aux narrateurs le mystère de faire des contes. On a attesté la foi que le berger qui peut dire chaque soir à la bergerie pendant un certain temps des contes toujours nouveaux est récompensé: une brebis de son troupeau met bas une agnelle magique, une agnelle qui a le don de prédire.
Les contes-mêmes se présentaient dans l’imagination artistique du peuple comme métamorphosés en feux brûlants. Dans un conte moldave écrit et publié à la Fin du XIX siècle l’on dit qu’à une demeure où trois hommes avaient passé la nuit et où chacun avait dit son conte, ces trois contes se firent trois flammes qui protégèrent la maison, de sorte que personne ne pût s’en approcher. C’est pourquoi, retint en 1903 la folkloriste E. N. Voronka (d’une conteuse du village de Makhala) il est bien de dire le soir des contes achevés, longs, puisque… ce conte fait trois fois le tour de la maison et aucun diable ne peut s’en approcher.
Le phénomène du conte est étudié en liaison profonde avec l’histoire du peuple et avec son évolution qui est déterminée par certaines conditions économiques et historiques. Le susdit n’a pas pour but de démontrer la fonction de défense par le conte contre les revenants, mais pour souligner le sens symbolique de ces vieilles fois selon lesquelles les contes dits durant de longues nuits d’automne ou d”hiver sont représentés en tant que bons défenseurs du foyer humain; ces contes chassent le mal et s’élèvent comme des flambeaux brûlants dont les rayons fondent le noir. La force protectrice, le torrent de lumière vient, bien sûr, de l’inépuisable source de préceptes des contes, des exploits glorieux, de la sagacité et des prouesses des héros épiques. Ceci est, de même, prouvé à profusion par les contes réunis dans la présente édition.
Les contes constituent une part importante dans l’héritage folklorique du peuple moldave. C’est depuis longtemps que l’on s’est mis à les collecter et à les publier. Beaucoup de motifs des créations populaires épiques en prose sont intégrés dans l’ancienne littérature moldave, dans les livres populaires.
Les contes moldaves ont attiré l’attention des écrivains russes et ukrainiens A.S. Pouchkine, A. M. Gorki, M. Kotsubinski ets. C’est des conteurs du peuple que M. Gorki a entendu la légende de Danko qui s’arrache le coeur et l’élève en flambeau pour éclairer la voie de ses semblables.
Certains textes des contes moldaves ont été publiés en russe par N. Guerba- novski et A. I. Latsimirski.Ces éditions ont un caractère de vulgarisation.
La folkloristique soviétique moldave connaît ses débuts dans les années 20—30. Le collectage et la publication scientifique de la création populaire orale s’effectuent par une section spéciale du Comité scientifique moldave qui a édité plusieurs livres. Beaucoup de récueils de contes populaires moldaves paraissent dans les années d’après- guerre. Les contes dits par le conteur Trifan Balta ont paru dans une publication à part.
Le folklore moldave est riche en contes fantastiques, légendaires, en contes nouvelles, en contes avec animaux et historiettes amusantes. Avec leurs idéaux lumineux de justice, de triomphe sur toutes les forces du mal, d’optimisme, de bienfaisance, les contes sont liés aux tourments et aux rêves de l’homme jadis opprimé. Les héros positifs parviennent à un destin heureux après une lutte téméraire et continue. La sagesse et la vaillance du protagoniste sont beaucoup appréciées dans ces créations.
Les occasions de conter étaient jadis très nombreuses. Mais le plus souvent c’était aux veillées qu’on disait les contes qui formaient le répertoire spécifique de ces réunions de travail collectif. Le travail et, en particulier, le filage était accompagné de blagues, de farces, de chansons, de récits, de devinettes et, bien sûr, de contes.
Soyez donc les bienvenus aux veillées dans les villages moldaves ou l’on dévide doucement le fil du conte et où l’on entend aujourd’hui encore la mystérieuse voix venant de la nuit des temps.
Les contes forment avec les doïnas, les vieilles chansons, les proverbes et les dictons la richesse d’âme du peuple et comportent des préceptes, des idées exaltantes et des beautés inouïes,
car si cela n’était,
on ne le conterait.
Gr. Botézatou